L’Université d’été européenne des mouvements sociaux, organisée à l’initiative du réseau des Attac d’Europe, s’est tenue à Toulouse du 23 au 27 août dans les locaux fraîchement rénovés de l’Université Jean Jaurès. Plus de 2000 personnes ont convergé vers la ville rose pour une université dont l’intitulé soulignait l’urgence de rassembler les forces militantes pour répondre à l’appel de l’UEE, « Débattons, résistons, agissons, c’est le moment ! » .
L’université s’est ouverte sur les prises de parole de responsables locaux et de Susan George membre d’honneur fondatrice d’Attac, Zoé Konstantopoulou, avocate, ex présidente du Parlement grec, fondatrice du mouvement Trajet de Liberté, Grèce et Edwy Plenel, dont le journal Médiapart joue un rôle important dans la contre information nécessaire en ces temps de collusion entre presse et pouvoirs industriels et financiers.
La presse alternative était d’ailleurs très présente. et de nombreux stands proposaient littérature et informations sur les mouvements de résistance citoyenne (1).
L’université s’est clôturée par une assemblée des mobilisations moment de convergence entre les mouvements sociaux pour envisager les moyens de « convaincre une majorité de citoyens que d’autres réponses sont possibles basées sur l’égalité des droits et la justice ».
La fête n’était pas oubliée, avec plusieurs groupes de musique,parce que « militer triste n’est pas efficace » et que ça fait du bien de danser et de rire comme antidote aux temps plombés que nous connaissons par ailleurs.
L’ensemble des thématiques débattues donne une idée de l’ampleur des chantiers ouverts pour qu’un « autre monde émerge ». L’avenir d’une Europe mise à mal par les traités transatlantiques et l’absence de démocratie des institutions, le travail menacé par la déconstruction des acquis sociaux, l’environnement et la poursuite de projets climaticides, ou encore la lutte contre toutes les formes de discriminations et beaucoup d’autres sujets, on trouvera ici l’ensemble du programme.
Un des ateliers consacré à la finance alternative a souligné l’importance d’une prise de conscience citoyenne de l’urgence d’une finance alternative représentée entre autres par deux coopératives de financement alternatif, l’une, IES, basée à Toulouse et rayonnant sur la région, l’autre , la NEF, d’envergure nationale et cherchant avec d’autres banques européennes à construire une finance européenne éthique.
Bérénice Dondeyne ( administratrice de l’ADEPES, du MES et du RIPESS EU) a alerté sur les effets pernicieux des SIB (Social Impact Bonds) qui sont désormais importés en France. Dans « les contrats à impact social », le financement de programmes confiés à des associations revient au secteur privé. A ce dernier de prendre le risque, récompensé en cas de succès par l’Etat qui rémunère l’économie que lui a permis de réaliser le SIB si le programme a rempli les objectifs sociaux qui lui étaient assignés. La question de qui mesure et sur quels critères l’impact social s’ajoute à celle d’une forme de détournement des fonds publics dans l’escarcelle des groupes financiers.. Les partenariats publics privés sont une autre façon pour l’État de se débarrasser de sa mission de service public.
Le RIPESS et le MES étaient associés à la réalisation d’un atelier en deux parties intitulé : Les alternatives comme levier de transformation sociale et politique, résistance et invention des possibles. L’atelier se déroulait en deux temps : à partir d’un film présentant des expériences d’ESS en Espagne (L’Espagne à contre-courant) et du témoignage in vivo d’un participant à la ZAD (2) Notre Dame des Landes, les participants (plus de 50) se sont distribués en sous groupes selon des thématiques qu’ils avaient choisies. Nous avons été un peu surpris de constater que le thème « comment déjouer l’entre-soi » a été celui qui a drainé la majorité des participants, les trois autres thèmes ayant également trouvé leur public : .communs / violence et désobéissance / municipalisme.
A Attac, la thématique des alternatives, portée par une commission spécifique est encore un peu marginalisée même si elle a fait son chemin et si un ouvrage est dédié à l’exploration des alternatives systémiques dont les alternatives concrètes seraient la mise en œuvre (3).
L’entre soi a été considéré par les participants comme une entrave à la généralisation des formes d’organisation autonomes de l’ESS. Il y a encore beaucoup à faire pour que les militants des mouvements sociaux organisés pour les luttes sociales s’intéressent à la forme de résistance que constitue l’invention de modes de production, de consommation, de transport, d’énergie, de financement, de gouvernance en rupture avec les modèles dominants. Pourtant, les formes inventées en situation de survie par les zadistes empruntent complètement les chemins de l’économie solidaire, notamment dans la recherche d’autonomie. Les alternatives sont une voie de rupture avec la société financiarisée mais il reste à convaincre ceux qui espèrent encore renverser frontalement le pouvoir au lieu de le vider de sa force par indifférence à l’égard de ses hochets consuméristes et mise au rencart de son obsession d’ultra contrôle sur le vivant qui de fait résulte en une totale incertitude sur l’avenir du monde.
Article rédigé par Josette Combes Co-Présidente du Mouvement pour l’Economie Solidaire
1. Voir le reportage de Reporterre https://reporterre.net/L-Universite-d-ete-d-Attac-sonne-le-regain-des-mobilisations
2. ZAD « Zone d’aménagement différé, transformée en zone à défendre par les activistes opposés à la réalisation d’un nouvel aéroport à Nantes sur des terres agricoles riches en biodiversité. https://zad.nadir.org/
3. Le monde qui émerge. Les alternatives qui peuvent tout changer. Attac, Les liens qui libèrent 2017. ici
4. voir article d’Attac sur l’université d’été